Jean Louis était incapable de rire devant un film débile parce qu’il cherchait toujours à comprendre et qu’il n’y a rien à comprendre dans un film débile.
Il faut juste lâcher prise.
Mais paradoxalement, il s’émerveillait devant un arbre, un paysage, les beautés de la nature et là, il lâchait prise alors qu’il n’y a rien à comprendre non plus.
Pourquoi la nature est belle ?
Comment fait-elle pour être si belle ?
Pourquoi il lâchait prise devant la beauté de la nature et pas devant un film débile ? Parce que ce qui était important pour lui était ce qui était vrai, ce qui n’était pas superficiel. Et le vrai de cette nature lui, lui permettait de lâcher prise, contrairement à la vacuité du dernier blockbuster.
C’était un homme de vérité, un homme vrai.
Jean Louis ne m’a jamais menti, ne s’est jamais menti.
Il a affronté sa réalité, ses faiblesses, sa maladie sans jamais la nier ou la cacher.
J’ai, pour la première fois de ma vie, lu le serment d’Hippocrate :
Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité.
Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité.
Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité….Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.
Je ferai tout pour soulager les souffrances
Jean Louis aura été un médecin toute sa vie, cherchant à « rétablir, préserver et promouvoir la santé ».
Il a aidé tellement de monde.
Un jour, je lui ai demandé combien de vies il avait sauvées. Il a eu l’air surpris et m’a répondu : aucune idée mais beaucoup peut-être.
Puis il m’a raconté l’anecdote du trauma cranien qu’il avait traité et qui avait évité au patient un lourd handicap.
Est-ce qu’il existe au monde un seul neurochirurgien, un seul patron de neurochirurgie d’un centre hospitalier d’une grande métropole comme Lille aussi humble, aussi modeste, aussi sincère dans sa démarche ?
Neurochirurgien, quand même, ce n’est pas rien. C’est le sommet absolu des compétences en médecine. Opérer un cerveau, une moelle épinière ou des nerfs demande un niveau de connaissances et une précision technique équivalents à celles d’un spationnaute.
J’ai vérifié.
Jean Louis Christiaens était au même niveau de compétences et de technique que Thomas Pesquet.
Personne ne l’a jamais entendu s’en vanter et il est probable qu’il nierait ce que je raconte.
Parce que pour lui, cette comparaison aurait été superficielle et qu’il avait dépassé ça.
Mais il y avait sa maladie et son histoire.
Une peur panique de la mort parce qu’il avait tellement peur de perdre contre ce qu’il appelait ses idées noires, parce qu’il craignait que lui aussi soit submergé par la force noire du suicide.
Il aura finalement gagné ce combat morbide, d’une intensité et d’une force que peu d’entre nous ne peuvent imaginer.
Dans notre monde, il y en a des pervers, des egoistes, des égocentrés, des méchants, des violents, des cons, des obtus et puis il y avait Jean Louis.
Un grand humain, un vrai humaniste.
Loin d’être parfait, bien loin, mais qui l’est, parfait ? Et victime de sa maladie tellement explosive pour ses proches parce que vu de l’intérieur, les montagnes russes, ça épuise.
J’ai eu la chance immense de le rencontrer